Alors que la réunion des blogueurs Toulousains "Blog/Garonne 2" vient de se terminer (bon, d'accord, c'était il y a 24 heures, ;-)), une discussion avec certains de mes congénères me pousse à donner ici, en ligne, ma position personnelle sur le téléchargement illégal, le piratage.
Il n'y a vraisemblablement pas de corrélation entre le téléchargement illégal et les entrées des films en salle, en tout cas pas de corrélation négative (l'augmentation du téléchargement illégal qui entrainerait la diminution des entrées dans les salles) :
- La fluctuation des entrées dans les salles est avant tout liée à la proposition de films,
- L'effet de la rénovation du parc d'exploitation (1,7 milliard d'euros investis depuis deux décennies en France) commence à porter ses fruits.
On ne peut que se réjouir de la bonne santé de la fréquentation cinéma, d'autant qu'elle est de plus en plus concurrencée par d'autres supports de diffusion, tels que le Dvd, le câble, le satellite, la VoD et le téléchargement illégal sur Internet. Alors, pourquoi tenter de diaboliser l'un pour "protéger" l'autre ?
Pour le DVD, car la vrai problèmatique tient à l'avènement du DVD (puis du Blu-Ray et du HD-DVD qui impliquent le renouvellement du support de films déja possédés) sur lequel les industriels se font de grosses marges.
Explications et point de vue :
On entend, deci delà, depuis environ 2 ans, des voix, qui s'élèvent : "Le piratage a toujours existé, dans tous les métiers du monde", il est "vieux comme le monde", a dit Jérôme Seydoux. Mais "ce qui est essentiel, c'est qu'il ne dépasse pas certains bornes" car sinon "les artistes ne pourraient plus vivre", a-t-il fait valoir.
Le cinéma voit pourtant ses entrées augmenter et le doit … au cinéma (quali), et au piratage. Car, si le piratage, au lieu de tuer la salle de cinéma, l’aidait au contraire ? Ne serait-ce parce que le cinéma ne peut pas s'en passer (permettre l'accès à des films indisponibles autrement) et parce que ceux qui font du fric avec le piratage finiront par se faire coincer.
L’appétit venant en mangeant, la copie illicite de films donnerait peut-être envie aux internautes de se retrouver dans une salle de cinéma devant un grand écran avec un son numérique de qualité et assis dans un fauteuil très confortable !
Alors pourquoi, pour les multinationales, le téléchargement en peer to peer serait « un instrument diabolique qui a mis le piratage à la portée de tous».
Je vous l'ai déja dit : pour le marché du DVD, pas pour les entrées réalisées par les cinémas, le premier réalisant à peu près le double du chiffre d'affaires des seconds !
Le téléchargement "illégal" n'entraine pratiquement aucune conséquence sur les entrées dans les salles ! Arrêtons de dire que le téléchargement ça bousille l’exploitation, ce n’est pas vrai.
Le cinéma est en crise depuis qu’il existe ! Les salles de cinéma sont en crise depuis qu’elles existent ! On a touché un plancher à la fin des années 70, début 80, quand on avait 116 millions de spectateurs. Depuis, nos entrées ont ré-augmenté avec l’arrivée des complexes puis ensuite des multiplexes, surtout les multiplexes… On a atteint un plafond en 2004 avec environ 195 millions de spectateurs alors que le téléchargement existait, on est descendu à 174 millions en 2005 avant de remonter en 2006 à 188,5 millions à peu de choses près… Donc elle est où la perte de spectateurs là ?!
Le cinéma est soit disant en crise parce qu’à chaque fois qu’il a essayé de se moderniser, ça a entraîné des coûts énormes, avec l’attente d’augmenter le nombre de spectateurs. Là, il se trouve qu’on a des produits en France, des multiplexes et des salles de cinéma plus classiques, qui sont formatés pour recevoir à peu près 200-210 millions de spectateurs par an.
Donc, si on ne les atteint pas, il faut un coupable et de suite, c’est le téléchargement. Mais, je le redis, c'est plus le marché du DVD qui est touché.
Je suis convaincu que dans 20 ans, il y aura toujours autant d'écrans de cinéma. Il y aura toujours autant de salles, et il y aura toujours autant de spectateurs dans les salles.
Le cinéma, c’est un certain nombre de spectateurs qui sont les 18-25 ans, et on perd peut-être une bonne partie des 18-25 ans parce que ce sont eux qui téléchargent le plus et donc du coup ils ne vont plus au cinéma. D’un autre côté, le «Papy boom» arrive, il y a de nombreux clients qui ont 60 ans (et plus) et qui ont besoin de loisirs. Ils ont bénéficié de la réduction du temps de travail, ils arrivent à la retraite, et ce ne sont pas eux qui auront le plus de difficultés pour venir au cinéma. Ils ont du temps et des moyens pour les loisirs.
Mais là encore, on va dire effectivement, «on est entrain de perdre une quantité de spectateurs énorme chez les jeunes, donc l’exploitation va mal !».
Non, pour l’instant ça ne se ressent pas trop dans les chiffres ! Le cinéma a toujours été en crise, on est toujours en crise. D’accord ça pourrait aller mieux, on serait peut-être à 210 millions de spectateurs s’il y avait pas le téléchargement illégal, mais que je sache on n’est pas à 150 millions de spectateurs non plus !
Puis, on a encore des spectateurs chez les jeunes. Comme tout ce qui est illégal, le téléchargement attire. Si on arrive à quelque chose d’équilibré entre le nombre de téléchargements et le nombre de spectateurs dans les salles, ça va. Ce qu’il ne faut pas, c’est que le nombre de téléchargements explose.
Aux exploitants de proposer un produit qui fera en sorte que les gens seront plus attirés par le produit salle que par le produit téléchargement illégal ! C’est le principe du cinéma numérique. Quand la projection sera entièrement numérique, on aura une qualité d’image qui sera encore supérieure… et forcément ça attisera la curiosité des gens, donc on aura encore des spectateurs.
Et puis le jour où on verra que ça baisse encore on fera autre chose, la 3 D par exemple (qui va arriver très vite dans les salles, d'ici 10 ans à très grande échelle).
Il y a toujours eu une évolution du cinéma. Dès que les entrées ont baissé, on a refait les salles, mais avant ça, on est passé du mono au stéréo puis au son numérique (LC concept, Dolby SRD, SDDS, DTS, DOLBY-EX). Enfin, on a commencé à sortir les premiers projecteurs numériques, là c’est en train de se développer…
A savoir qu’avant, jusqu’au début des années 70, il n'existait presque que des écrans uniques en centre-ville, il n'y avait que des grandes salles de cinéma avec 200, 300, 600 places voire plus, avec des balcons, etc. Le nombre de spectateurs a commencé à chuter, et d’un seul coup quelqu’un a dit «tiens, ben on va casser ces grandes salles uniques et puis on va faire plusieurs salles dedans…».
Les grandes salles uniques ont été tronçonnées, coupées en deux, trois, quatre salles… ça a permis de proposer plus de films, sur moins de temps, vu qu’à l’origine avec une seule salle, un film pouvait rester six mois à l’affiche.
Un peu plus tard, le nombre de clients a recommencé à baisser. L'industrie du cinéma a accéléré le rythme de rotation des films, mais les entrées continuaient à baisser. On en est revenu aux grands écrans, les premiers multiplexes sont nés… au même moment, on est passé du son stéréo au son numérique, etc.
A chaque fois qu'il s'est retrouvé confronté à la crise, le cinéma a su retomber sur ses pattes ! A chaque fois !
Alors téléchargement illégal oui, je pense que l’ALPA a raison de faire la chasse aux gros téléchargeurs, c’est-à-dire aux vrais pirates, ceux qui téléchargent 24/24 h, ceux qui gravent sur des DVD et qui les refourguent à leurs potes ou qui les revendent… ceux-là oui, effectivement, sont une vraie plaie, il faut les combattre, les arrêter, les juger et les condamner…
Après, les jeunes de 15/30 ans qui vont télécharger dix, vingt films, ils vont les graver, ils vont les regarder deux, trois fois (parfois, ils ne vont même pas les regarder, tellement ils en téléchargent), mais il leur manquera quand même quelque chose, c’est la notion de spectacle en groupe dans une grande salle. Et ça c’est inaliénable, ce n’est pas quelque chose que l’on peut enlever comme ça !
Je suis d’un naturel optimiste, et on peut me sortir tous les palliatifs à l’achat d’une place de cinéma, les gens ont besoin d’un spectacle en commun, et tant que ça existera, le cinéma s’en sortira.
La salle de cinéma s'en sortira aussi tant elle aura cette capacité à évoluer. Il y aura, après la projection numérique, la projection en 3D, de la vraie 3D sans lunettes spéciales, ni autre… Avec la projection numérique, on aura la sensation que l’image sort vraiment de l’écran. Puis, il y aura ensuite les écrans OLED à matrice active, mais là, je parle d'un futur à au moins 15/20 ans (Un écran OLED -Organic Light Emitting Diode- à matrice active n’est pas rétro éclairé, il est lui-même éclairé. L’image ne vient pas de derrière ou devant l’écran -principe de la projection-, mais de l’écran lui-même. Chaque point (pixel) est éclairé à une intensité différente, et donc la différence de luminosité et de contraste donnera une image en 3D sur grand écran !La photo représente un prototype d'écran OLED 14". Les futurs écrans de cinémas se dessinent... ) ==> Merci aux 2 auteurs du site Filmspournous qui m'ont permis de reprendre les réponses que je leur avais données lors de l'ITW que je leur avais accordée en décembre dernier.
Pour en terminer avec le sujet, on sent quand même le sens de l'histoire tourner. Le box-office américain, celui de ce pays champion du monde du téléchargement illégal, a vu ses recettes ré-augmenter en 2006 (+5,5%). Il semble, de plus, que les plus assidus dans les salles de cinéma soient aussi les mieux équipés en nouvelles technologies. Que du bonheur ?