Daniel Kaplan, délégué général de la Fondation internet nouvelle génération et Frank Beau, expert TIC, chargé de mission à la Fing, ont réunis une belle brochette d'auteurs afin d'élaborer le 1er numéro des Nouveaux Dossiers de l'Audiovisuel , dont le sujet est logiquement le piratage .
Au sommaire, une analyse très fine du sujet. Et il en ressort que :
- Selon l'Idate, 150 milliards de fichiers musicaux auraient été téléchargés sur les réseaux P2P en 2003, un chiffre à comparer aux 2,7 milliards d'albums vendus en magasin et aux 150 millions de titres vendus en ligne. Les auteurs du dossier, comme nous, supposent bien qu'une part de ces téléchargements sont des ventes perdues. Pourtant, les études n'attribuent généralement pas plus du quart de la décroissance du marché à la copie et certaines considèrent que son effet est pratiquement nul. L'échange de fichiers réduirait certes la vente de certains titres, mais favoriserait également la découverte d'autres artistes, qui déclencherait ensuite des achats. D'autre part, les internautes téléchargent bien plus de titres qu'ils ne pourraient en acheter - et parfois même en écouter ! La concurrence des radios et télévisions musicales, le succès du DVD, la situation économique ou la fin du cycle de croissance du CD audio - la crise fait suite à une augmentation historique du chiffre d'affaires de la musique - expliqueraient une bonne part de la baisse des ventes.
- Les réseaux P2P génèrent aujourd'hui la moitié du trafic des réseaux haut débit résidentiels. Conclusion : ceux-ci se développent sur le dos des industries culturelles. Cependant, moins d'un cinquième des internautes utilise les réseaux P2P (source Pew Internet Report) et la prédominance des échanges de fichiers dans le trafic est transitoire : les milliards de photos et vidéos personnelles, les dizaines de milliards d'appels téléphoniques qui circuleront bientôt sur l'internet noieront sous leur volume les fichiers copiés.
- la place de la musique dans notre quotidien (et notamment dans celui des plus jeunes) a profondément changé depuis 20 ans. À domicile, en déplacement, dans les lieux publics, dans toute sorte d'événements, la musique est devenue omniprésente. Souvent, on la vit plus qu'on ne l'écoute. Elle devient un espace que l'on partage, un signe que l'on se transmet : la compil' créée pour une soirée, la sonnerie de son mobile, la musique de fond de son répondeur... Le numérique est l'outil, mais pas la cause, de cette évolution, dont l'échange de morceaux musicaux est une conséquence logique.
Si cette analyse est juste, il est peu probable que la vidéo (et donc le cinéma) soit à l'avenir autant touchée par le phénomène P2P que la musique ou les programmes informatiques (tant mieux pour mon avenir professionnel, ;-)).