"Je suis objectivement le metteur en scène qui a reçu le plus grand nombre de mauvaises critiques dans sa carrière, attendu que tous mes films sans exception ont été traînés dans la boue et que j’en ai fait quarante; ce qui fait à la longue une très grosse quantité de fange. Dès «le Propre de l’homme», en 1960, les « Cahiers du cinéma » ont écrit: «Lelouch: retenez ce nom; vous n’en entendrez plus jamais parler.»
Ensuite, à chaque film, la critique est montée en puissance."
Il y voit une explication :
"J’ai commis le péché originel: je suis un contemporain de la Nouvelle Vague qui n’a pas voulu en faire partie, et c’est impardonnable. J’ai débuté tout seul comme opérateur d’actualités pendant la guerre d’Algérie, et j’ai vu à quel point la pellicule 400 ASA (la fameuse 4X) avait compté dans la naissance d’un cinéma nouveau. Pour moi, la Nouvelle Vague est une révolution de chefs opérateurs, pas d’auteurs. J’étais donc flingué, n’étant pas de la bande, ce qui ne me dérangeait pas. Je fais un cinéma de feeling. Mon inconscient est plus important que ma réflexion. Je cherche seulement à fixer des moments où les acteurs arrêtent de jouer, des instants de vérité fugaces… Ce que j’aime, ce sont ces éclairs qu’on serait incapable de refaire. Des fragments d’invisible. Pour introduire ces moments, c’est vrai, j’ai souvent sacrifié la construction. Mais il faut croire qu’il y avait dans «Un homme et une femme» plus de ces moments de vérité que d’habitude puisque le film a eu la palme d’or, deux oscars, un public énorme et qu’il reste le plus grand succès français à l’étranger. Truffaut m’a invité alors à déjeuner pour me dire – je crois qu’il était sincère – qu’il adorait le film, et qu’il me considérait comme l’enfant de la Nouvelle Vague (j’avais 27 ans) qui avait le mieux grandi.
Sincérité pour sincérité, je lui ai dit ce que je pensais: «Nous venons de deux endroits différents, vous de la littérature, moi de la caméra. Vous vous servez du cinéma pour vendre les romans que vous aimez, et vous avez massacré tous mes mythes: Clément, Clouzot, Duvivier, Gabin, Morgan, tous ceux qui m’ont formé. Avant que vous ne les détruisiez par vos écrits, ces gens avaient poussé très loin l’art de l’image, de la narration, du naturel. Si vous leur aviez laissé leur chance, ils auraient utilisé les nouvelles pellicules autant que vous. Leurs films avaient le mérite d’intéresser énormément les spectateurs. L’histoire du cinéma doit autant, et sans doute davantage, aux cinéastes populaires qu’aux avant-gardistes: David Lean vaut bien Fellini, et de la Nouvelle Vague je ne sauve que Godard et l’interrogatoire de Léaud dans "les Quatre Cents Coups". Tout le reste, je le rejette, et je ne veux pas faire partie d’une famille que je n’approuve pas.» Nous nous sommes quittés sur ces mots. Je ne sais pas s’il y a un rapport, mais quelques jours plus tard les « Cahiers» assassinaient «Un homme et une femme» avec férocité." (in NouvelObs)
Je vais donc faire un rapide raccourci :
Lelouch pense que les critiques actuels (dont une bonne partie a tout juste 40 ans et n'a jamais rencontré Truffaut) sont comme leurs "grands frères" : Ils doivent penser qu'il faut lui cracher dessus parce qu'il a craché sur les cahiers du cinéma !
Mais il a fait plus que ça, lui : il réduit carrément la nouvelle vague à la création d'une pellicule !!
Non, mais oh, il arrête le parano ?